La loi PACTE ou le dernier avatar de la réforme de l'entreprise : une relecture historique depuis 1945

auteurs

  • Hollandts Xavier
  • Chapas Benjamin
  • Aubert Nicolas

type de document

COMM

résumé

A l’heure où la loi PACTE va peu à peu étendre la représentation des salariés à la gouvernance de l’entreprise, on peut considérer que la gouvernance des entreprises françaises est peu à peu en train de muter en s’ouvrant notamment aux salariés, ce qui pose de façon plus large la question de la potentielle réforme de l’entreprise. Se poser cette question c’est envisager un changement de paradigme. En premier lieu, c’est considérer que les décisions stratégiques de l’entreprises ne concernent pas seulement les dirigeants et les actionnaires les plus influents. C’est symboliquement accepter autour de la table (du conseil) des salariés, généralement relégués au rang de simples collaborateurs ou d’apporteurs de force de travail, pourtant indispensables au fonctionnement concret de nos entreprises contemporaines. C’est également ouvrir la porte à la diversité des profils au sein des conseils, s’éloignant incidemment du phénomène de petit monde, souvent utilisé pour décrire le milieu souvent fermé voire secret de la gouvernance des sociétés (Kogut 2012). Envisager la réforme de l’entreprise et la participation des salariés c’est également se replonger dans des débats qui furent vifs autour de la question de la démocratie industrielle et des relations sociales (Mouriaux 2013). Dans le cadre de cet article, nous proposons une lecture historique de la question de la possible participation des salariés à la gouvernance de l’entreprise, souvent envisagée comme un idéal de participation démocratique à l’intérieur de l’entreprise (Chapas et Hollandts 2017). Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, c’est plus de soixante-dix ans d’histoire des relations sociales et de la gouvernance participative qui peuvent se lire autour d’un enjeu et de débats autour de la question essentielle de la réforme de l’entreprise. Notre analyse longitudinale et socio-historique s’appuie principalement sur les principaux jalons (schématiquement un par décennie) qui cristallisent à un moment donné les éléments du débat autour de la réforme de l’entreprise. Une attention particulière est portée sur le rapport Sudreau (1975) qui aurait pu constituer un tournant décisif pour la réforme de l’entreprise. Notre article entend contribuer sur plusieurs éléments. Sur le plan de la gouvernance, il retrace historiquement les textes fondateurs et les racines de la participation des salariés à la gouvernance et plus généralement des alternatives à la gouvernance actionnariale. Sur le plan de l’histoire des idées, cet article documente également la réduction du projet de réforme de l’entreprise qui s’étiole au fil des décennies pour se réduire au final à la question (technique) du nombre de salariés au conseil, bien loin des premières tentatives qui entendaient fonder de nouvelles sociétés et de nouvelles approches en matière de gouvernance. Enfin, notre article discute également de façon critique le cadre actuel d’association des salariés à la gouvernance et s’interroge sur la réforme de l’entreprise, en tant qu’institution centrale du capitalisme contemporain.

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